mercredi, octobre 31, 2012

XVIIème SEMANE DE LUTTE CONTRE LE GENOCIDE: CONFERENCE INAUGURALE


Texte intégral de la communication de M. Tatien Sibomana intitulé ...
 
LES DROITS DES PERSONNES DEPLACEES A L’INTERIEUR DE LEUR PROPRE PAYS.

0. INTRODUCTION.

Les droits des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont consacrés par les Conventions et Traités Internationaux, la Loi Fondamentale du BURUNDI (la Constitution) et plus particulièrement par l’ACCORD D’ARUSHA POUR LA PAIX ET LA RECONCILIATION AU BURUNDI.
Nous allons développer notre communication en trois titres à savoir :

TITRE I. Les Droits des personnes déplacées à travers les Conventions et Pactes Internationaux.
TITRE II : Les Droits des personnes déplacées à travers les lois et autres textes nationaux.
TITRE III : Les droits des personnes déplacées dans leur vécu quotidien.
 Ce titre est considéré comme la conclusion de notre communication dans la mesure où il va être centré sur  la mise en œuvre de ces droits consacrés par les textes Internationaux et nationaux au profit de nos déplacés.

TITRE I : LES  DROITS DES PERSONNES DEPLACEES A TRAVERS LES CONVENTIONS ET PACTES INTERNATIONAUX.

CHAP: HISTORIQUE :

En 1992, le Secrétaire Général des Nations Unies a nommé, à la demande de la Commission des Droits de l’Homme, le Premier représentant chargé des Personnes déplacées dans leur propre pays.
En 2004, la Commission a demandé au Secrétaire Général de créer un nouveau mécanisme afin de tirer utilement profit des travaux de l’ancien Représentant et d’appeler davantage l’attention sur les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur pays.

Ainsi, une personne du nom de WALTER Kälin  a été nommée en Septembre 2004.
Le mandat du Représentant était appuyé par le Haut –Commissariat des droits de l’homme et comptait sur du soutien du Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires et du Projet de la Brookings Institution et de l’Université de Berne sur les déplacements internes, un projet Indépendant de recherche et de plaidoyer dont le Représentant est Codirecteur.

Mandat.
 
Le mandat du Représentant du Secrétaire Général des Nations Unies est déterminé par le Conseil des droits de l’Homme. Ainsi, conformément à sa résolution, il est chargé de :
1° Promouvoir de manière coordonnée la protection et le respect des doits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays ;
2° Poursuivre et consolider le dialogue avec les Gouvernements ainsi qu’avec les Organisations non Gouvernementales et les autres acteurs ;
3° Renforcer la réaction internationale aux déplacements internes ;
4° Intégrer les droits  de l’homme de toutes les personnes déplacées dans leur propre pays dans l’ensemble du système des nations Unies ;
5° Renforcer la coopération qui s’est instaurée entre le Représentant du Secrétaire général et les organismes des Nations Unies, notamment dans le cadre de la Commission de la Consolidation de la Paix ainsi qu’avec d’autres organisations internationales et Régionales et Régionales , en particulier en participant aux travaux du Comité Permanent des inter organisations e de ses organes subsidiaires.

Il lui a été aussi demandé de :
-           Consolider  les travaux de son prédécesseur en matière de sensibilisation sur la question des droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays  et de diffuser les principes Directeurs relatifs au déplacement des personnes à l’intérieur de leur propre pays (E.CN.4/1998/52/Add.2) au niveau national, régional et international ;
-          Effectuer des missions dans les pays ;
-          Organiser des Séminaires nationaux et régionaux ;
-          Soutenir le renforcement des capacités des Organisations non Gouvernementales et des autres Institutions intéressées ;
-          Poursuivre les recherches sur l’élaboration des politiques.
Cet éminent Juriste Suisse, WALTER Kälin, a présidé la Commission d’Experts en droit qui a élaboré les Principes Directeurs Relatifs au Déplacement des Personnes à l’intérieur de leur propre pays.
De 1991 à 1992, il était rapporteur Spécial de la Commission des Droits de l’homme sur la situation des droits de l’Homme au Koweït sous occupation irakienne.
Les textes Internationaux qui consacrent les droits de la personne humaine sont nombreux. Nous pouvons en citer quelques uns parmi les plus importants:
1. La déclaration Universelle des Droits de l’homme.
2. La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.
3. Le Pacte International Relatif aux droits Civils et Politiques.
4. Les Principes Directeurs du HNCR Relatifs au Déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays.
Dans notre démarche, je vais m’appesantir sur ces derniers car ils parlent de façon spécifique des droits des personnes déplacées alors que les autres parlent des droits de la personne humaine de façon générale.

CHAPII: PRINCIPES DIRECTEURS DU HCNUR RELATIFS AU DEPLACEMENT DE       PERSONNES  A L’INTERIEUR DE LEUR PAYS.


Dans la déclaration du Sommet mondial, adopté en septembre 2005, à New York, les Chefs d’État ont reconnu les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays comme « un cadre international important pour la
protection de personnes déplacées ».
Les Principes Directeurs devraient fournir une orientation pratique extrêmement utile aux gouvernements et autres autorités compétentes, ainsi qu’aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales dans l’exécution de leurs activités auprès  des personnes déplacées.
Ils visent à répondre aux besoins particuliers des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays à travers le monde. Y sont identifiés les droits et les garanties concernant la protection des personnes contre des déplacements forcés et la protection et l’aide qu’il convient de leur apporter au cours du processus de déplacement, ainsi que pendant leur retour ou réinstallation et leur réintégration.

Définition : « Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont des personnes ou des groupes de personnes qui ont été forcés ou contraints à fuir ou à quitter leur foyer ou leur lieu de résidence habituel, notamment en raison d’un conflit armé, de situations de violence généralisée, de violations des droits de l’homme ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l’homme ou pour en éviter les effets, et qui n’ont pas franchi les frontières internationalement reconnues d’un État ».

Les Principes Directeurs sont multiples et comprennent :

Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays jouissent, sur un pied d’égalité, en vertu du droit international et du droit interne, des mêmes droits et libertés que le reste de la population du pays.

C’est aux autorités nationales qu’incombent en premier lieu le devoir et la responsabilité de fournir une protection et une aide aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays qui relèvent de leur juridiction.

Certaines personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, telles que les enfants, en particulier les mineurs non accompagnés, les femmes enceintes, les mères d’enfants en bas âge, les femmes chef de famille, les personnes souffrant d’incapacités et les personnes âgées ont droit à la protection et à l’aide que nécessite leur condition et à un traitement qui tienne compte de leurs besoins particuliers.

Il y a des Principes relatifs à la protection contre le déplacement, parmi lesquels :

Toutes les autorités et tous les membres concernés de la communauté internationale respectent les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, notamment les droits de l’homme et le droit humanitaire, et assurent leur respect en toutes circonstances de façon à prévenir et éviter les situations de nature à entraîner des déplacements de personnes.

Chaque être humain a le droit d’être protégé contre un déplacement arbitraire de son foyer ou de son lieu de résidence habituel. L’interdiction des déplacements arbitraires s’applique aux déplacements qui sont la conséquence de politiques d’apartheid, de politiques de « nettoyage ethnique », ou de pratiques similaires; qui interviennent dans des situations de conflit armé, à moins que la sécurité des personnes civiles concernées ou des raisons militaires impérieuses ne les aient rendus nécessaires ; qui sont opérés, en cas de catastrophes, à moins que la sécurité et la santé des personnes concernées n’exigent leur évacuation ; et qui sont utilisés comme un moyen de châtiment collectif.

Il y a des Principes relatifs à la protection au cours du déplacement, parmi lesquels :

Les attaques ou d’autres actes de violence contre des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays qui ne participent plus aux hostilités sont interdits en toutes circonstances.
Les personnes déplacées sont protégées, en particulier contre :

a) les attaques directes ou aveugles ou d’autres actes de violence, y compris la délimitation de zones dans lesquelles les attaques contre les civils sont autorisées ;
b) l’utilisation de la faim comme méthode de combat ;
c) l’utilisation des personnes déplacées comme bouclier pour protéger des objectifs militaires contre des attaques ou pour couvrir, favoriser ou empêcher des opérations militaires ;
d) les attaques visant les camps ou zones d’installation des personnes déplacées ;
e) l’utilisation de mines terrestres antipersonnel.

Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays seront protégées, en particulier contre :

a) le viol, la mutilation, la torture, les traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants et d’autres atteintes à leur dignité tels que les actes de violence visant spécifiquement les femmes, la prostitution forcée et toute forme d’attentat à la pudeur ;
b) l’esclavage ou toute forme contemporaine d’esclavage (vente à des fins de mariage, exploitation sexuelle, travail forcé des enfants, etc.) ;
c) les actes de violence visant à semer la terreur parmi les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.

En aucune circonstance les enfants déplacés ne seront enrôlés dans une force armée ou obligés ou autorisés à participer à des combats. Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays seront protégées contre les pratiques discriminatoires consistant à tirer parti de leur situation pour les enrôler dans des forces ou des groupes armés.

Toutes les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays ont le droit d’être
informées du sort de leurs proches portés disparus et du lieu où ils se trouvent.

Les familles séparées par suite de leur déplacement doivent être réunifiées aussi
rapidement que possible. Toutes les mesures requises seront prises pour accélérer
la réunification de ces familles, notamment lorsqu’il y a des enfants.

Toutes les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays ont droit à un
niveau de vie suffisant :
a) aliments de base et eau potable ;
b) abri et logement ;
c) vêtements décents ;
d) services médicaux et installations sanitaires essentiels.

Toute personne a droit à l’éducation. Pour donner effet à ce droit, les autorités concernées veilleront à ce que les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, en particulier les enfants déplacés, reçoivent gratuitement un enseignement qui revêtira un caractère obligatoire au niveau primaire. Des efforts particuliers seront faits pour assurer la pleine et égale participation des femmes et des filles dans le cadre des programmes d’enseignement.

Il y a des Principes relatifs à l’aide humanitaire, parmi lesquels :

Toute aide humanitaire sera fournie dans le respect des principes d’humanité et d’impartialité et à l’abri de toute discrimination.

Toutes les autorités concernées autoriseront et faciliteront le libre passage de l’aide humanitaire et permettront aux personnes chargées de la distribuer d’accéder rapidement et librement aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays.

Les organisations internationales humanitaires et les autres parties concernées  accorderont, dans le cadre de l’aide qu’elles apportent, l’attention voulue au besoin de protection et aux droits fondamentaux des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et prendront les mesures nécessaires à cet effet. Ce faisant, ces organisations et parties respecteront les normes et les codes de conduite internationaux.

Il y a des Principes relatifs au retour, à la réinstallation et à la réintégration, parmi lesquels :

C’est aux autorités compétentes qu’incombent en premier lieu le devoir et la responsabilité de créer des conditions propices au retour librement consenti, dans la sécurité et la dignité, des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays dans leur foyer ou leur lieu de résidence habituel ou à leur réinstallation volontaire dans une autre partie du pays, ou de leur fournir les moyens nécessaires à cet effet.

Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays qui ont regagné leur foyer ou leur lieu de résidence habituel ou se seront réinstallées dans d’autres régions du pays ne feront l’objet d’aucune discrimination en raison de leur déplacement.

Toutes les autorités concernées autoriseront et aideront les organisations humanitaires internationales et les autres parties concernées à accéder librement et rapidement, dans l’exercice de leurs mandats respectifs, aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays pour les aider dans le cadre de leur retour ou réinstallation et de leur réintégration.

TITRE II. LES DROITS DES PERSONNES DEPLACEES A TRAVERS LES LOIS ET LES AUTRES TEXTES NATIONAUX.
Les lois et autres textes nationaux n’ont pas passés sous silence les droits de cette catégorie de personnes.
En effet, la Loi Fondamentale du BURUNDI (Constitution), l’Accord d’ ARUSHA pour la Paix et la Réconciliation au BURUNDI ainsi que le Code Pénal Burundais ont prévu en leur sein des dispositions qui traitent de cet aspect.

CHAP I : La LOI  FONDAMENTALE DU BURUNDI (la Constitution).

Comme cela a été réaffirmé dès l’introduction de cette communication, les déplacées intérieures sont des personne à par entière, donc égaux en droits et en devoirs aux autres citoyens. C’est pourquoi, la Loi Fondamentale, tout comme les autres textes, prévoit les dispositions  qui affirment les droits et libertés des citoyens d’une manière générale.

Ainsi, dans la loi n° 1/010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la Constitution de la République du BURUNDI réaffirme déjà ces droits dans son préambule.
Au 4ème attendu, la Constitution proclame l’attachement du BURUNDI au respect des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu’ils résultent  notamment :
-          De la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 ;
-          Des Pactes Internationaux des droits de l’Homme du 16 décembre 1966 ;
-          De la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 18 juin 1981.
A l’avant dernier attendu du Préambule de la même Constitution, il est dit que :
« Réaffirmant notre détermination inébranlable à mettre un terme aux causes profondes de l’état continu de la violence ethnique et politique, de génocide et d’exclusion, d’effusion de sang, d’insécurité et d’instabilité politique, qui ont plongé le peuple dans la détresse de la souffrance et compromettent gravement les perspectives de développement économique et réalisation de l’égalité et de la justice sociale dans notre pays ».
Il en est de même de pas mal de dispositions de cette Constitution. Qu’il importe de mettre en exergue les suivantes sans toutefois être exhaustifs.
Article 13 : «  tous les Burundais sont égaux en mérite et en dignité. Tous les citoyens jouissent des mêmes droits et ont droit à la même protection de la loi. Aucun Burundais ne sera exclu de la vie sociale, économique ou politique de la nation du fait de sa race, de sa langue, de sa religion, de son sexe ou de son origine ethnique. »
Article 14 : « Tous les Burundais ont le droit de vivre au BURUNDI dans la paix et dans la sécurité. Ils doivent vivre ensemble dans l’harmonie, tout en respectant la dignité humaine et en tolérant leurs différences ».
Article 21 : «  La dignité humaine est respectée et protégée. Toute atteinte à la dignité humaine est réprimée par le Code Pénal ».
Article 33 : Tous les citoyens burundais ont le droit de circuler et de s’établir librement n’importe où sur le territoire national, ainsi que de le quitter et d’y revenir ».
Article 36 : Toute personne a droit à la propriété.
Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’ utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité ou en exécution d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée ».
CHAP. II : L’ACCORD D’ARUSHA POUR LA PAIX ET LA RECONCILIATION AU BURUNDI.
La question des personnes déplacées à l’intérieur avait retenu l’attention des négociateurs de cet Accord. Ceci transparait dans les Protocoles III sur la Paix et la Sécurité pour tous ainsi qu’au Protocole IV sur la Reconstruction et le Développement.

PROTOCOLE III : SUR LA PAIX ET LA SECURITE POUR TOUS.

Tout est basé sur le principe qui dit que « tous les citoyens burundais sans distinction ont le droit de vivre en paix et en sécurité ».
Ils ont spécifié quelques uns des devoirs des Institutions de l’Etat dans ce domaine. Ils sont notamment :
a) la sécurité pour tous les citoyens
b) La défense des droits inaliénables de la personne humaine, à commencer par le droit à la vie et tous les droits énumérés notamment dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et dans les Conventions internationales auxquelles le BURUNDI est partie.
c) La protection de toutes les communautés ethniques de la population par des mécanismes spécifiques pour prévenir les coups d’Etat, la ségrégation et le génocide.

PROTOCOLE V. LA RECONSTRUCTION ET LE DEVELOPPEMENT.

C’est dans ce protocole où les droits des personnes déplacées ont été explicitement évoqués.
En effet, les questions liées à la réhabilitation et à la réinstallation des réfugiés et des sinistrés, à la reconstruction matérielle et politique ainsi qu’au développement économique et social ont été analysées.

CHAP. I : Réhabilitation et réinstallation des réfugiés et des sinistrés.

Le terme « sinistré » désigne toute personne déplacée ou rapatriée.
Les négociateurs de l’Accord d’ ARUSHA pour la Paix et la Sécurité au BURUNDI ont énoncé quelques principes dont deux parmi eux me semblent les plus importants. Il s’agit de :
1° « Le retour doit être volontaire et doit se faire dans la dignité avec des garanties de sécurité, en tenant compte de la vulnérabilité particulière des femmes et des enfants ».
2° « Les sinistrés qui estiment ne plus pouvoir rentrer dans leurs propriétés doivent bénéficier des conditions spécifiques qui leur permettent de retrouver une vie socio-professionnelle normale ».
D’autres actions qui avaient été identifiées comme la création d’une Commission Nationale de Réhabilitation des Sinistrés(CNRS) et la Commission Nationale des Terres et Autres Biens (CNTB).
La première avait aidé tant bien que mal dans la construction des sites des déplacés tandis que la deuxième, loin de servir les intérêts de tous les sinistrés, elle n’a que l’unique mission de servir les rapatriés au point d’exproprier des gens au mépris des lois et des décisions judicaires.
Les mêmes négociateurs avaient donné quelques orientations concernant la réinstallation et la réinsertion. Telles sont notamment :
1° Installer sur des sites proches de chez eux tous ceux qui estiment ne pas pouvoir encore rentrer afin de leur permettre d’aller travailler dans leur champs dans un premier temps.
2° Encourager l’habitat groupé, dans la politique de reconstruction pour dégager les terres cultivables.
3° Tout réfugié et /ou sinistré doit pouvoir récupérer ses biens.
4° La politique de distribution des terres domaniales est revue de manière à accorder la priorité à la réinstallation des sinistrés.

CHAP.II : La reconstruction matérielle et politique.

Parmi les mesures qu’avaient préconisées les négociateurs d’ARUSHA, la reconstruction matérielle et politique occupait une place de choix.
C’est un processus dont les caractéristiques sont de deux ordres :
1. Approche : intégrer la réhabilitation, la consolidation de la Paix, la promotion des doits et liberté de la personne humaine, la croissance économique et le développement à long terme.
2. Ce programme doit être conçu dans le sens de l’équité afin que toute la population puisse en profiter.

TITRE III. LES DROITS DES PERSONNES DEPLACEES DANS LEUR VECU QUOTIDIEN.

Partant du principe réaffirmé dans les Principes Directeurs précités «  les personnes déplacent à l’intérieur de leur propre pays jouissent, sur un pied d’égalité, en vertu du Droit International et Interne, des mêmes droits et libertés que le reste de la population du pays », faisons un bref aperçu sur le respect des droits des personnes déplacées consacrés dans tous ces textes internationaux et nationaux.
Les droits fondamentaux des personnes déplacées ou pas ne sont pas respectés par les autorités burundaises car, le droit à la vie, le droit à une justice saine et équitable sont régulièrement violés dans notre pays.
Mais de manière spécifique, les droits des personnes déplacées à l’intérieur du BURUNDI, sont violés de façon systématique.
Nous pouvons en épingler les suivants :

1. droit à la sécurité et à l’aide.

Les autorités nationales ont le devoir de fournir une protection et une aide aux personnes déplacées. La réalité est que aucune protection ou aide n’est consentie à nos déplacés. Les sites ont été à plusieurs reprises la cible des attaques qui ont causé tant de morts : cas de BUGENDANA, TEZA, BUTEZI etc…. alors que les Principes Directeurs précisent que ces personnes doivent être protégées contre les attaques visant les sites.
Même les mineurs non accompagnés, les femmes enceintes, les mères d’enfants en bas âge, les femmes chefs de famille, les personnes souffrant d’incapacité et les personnes âgées qui devaient bénéficier de la protection et de l’aide compte tenu de leurs besoins particuliers ne les ont jamais.

2. Le Droit à la vérité.

Les autorités ont le devoir d’informer les personnes déplacées du sort de leurs proches portés disparus et du lieu où ils se trouvent. Ici on fait allusion aux disparus mais qui ont survécu.
La même obligation s’impose aux autorités dans le cas des personnes tuées et des biens pillés.
Présentement, les personnes déplacées n’ont pas encore eu droit à la vérité sur tous ce qui s’est passé. Même le Mécanisme non Judicaire de Commission Vérité convenu entre le Gouvernement du BURUNDI et les Nations Unies est bloqué par des autorités qui de près ou de loin se trouvent impliqués dans ces crimes qui ont causé le déplacement forcé de ces gens.

3. Droit à une vie décente.

Les personnes déplacées ont droit à un niveau de vie suffisant. On pense aux aliments de base et l’eau potable, l’abri et logement décent, les vêtements décents et les services médicaux et installations sanitaires essentiels. Cela n’a jamais été la préoccupation des autorités burundaises. Les déplacés devaient bénéficier du processus de cicatrisation mais les pouvoirs publics ne se soucient guerre de ces gens.

4. Droit à l’éducation.

Les enfants déplacés doivent être assistés jouir du droit à l’éducation. Ils doivent bénéficier d’un enseignement gratuit avec un caractère obligatoire au Primaire. La réalité est toute autre car, même les cahiers distribués n’arrivent pas dans les sites.

5. Droit à la dignité.

Comme le déplacement des ces personnes n’a pas été un fait de hasard, leur retour doit être librement consenti. Pour y parvenir, les autorités doivent créer les conditions propices à leur retour dans les propriétés. Telles sont notamment la sécurité morale et physique des déplacés, leur la dignité.
Or, ce que font les autorités aujourd’hui en les forçant à rentrer n’est que le contraire de ce qui est prévu dans les textes internationaux et l’ACCORD d’ARUSHA pour la Paix et la Réconciliation au BURUNDI qui parlent de retour volontaire et librement consenti. Aucune condition  de sécurité ni morale ni physiques n’est remplie pour que ces déplacés regagnent leurs propriétés.

6. Droit à la justice.

Les déplacés qui sont en même temps victimes des actes de violences, aujourd’hui du génocide pour le cas de notre pays, ont droit à la justice qui leur permet de se réconcilier avec eux-mêmes et avec les autres. Mais loin de tendre vers cet idéal, les autorités burundaises brillent par un négationnisme béant, se refusant même de mettre en place le tribunal spécial convenu entre Burundais et la Communauté Internationale.

7. Droit à un traitement non discriminatoire.

Les personnes déplacées ne doivent faire l’objet d’aucune discrimination en raison de leur déplacement même si ils regagnent leur foyer ou leur habituel ou se sont réinstallées d’autres régions du pays.
Or les autorités actuelles affichent une discrimination à peine voilée contre les déplacées. Ils construisent des villages dits de paix pour les autres mais ne veulent pas que les déplacés soient éligibles. Il en est de la distribution des bovins via certains Projets ou ONGs où les déplacés ne sont jamais éligibles.
Bref, on dirait qu’ils constituent un groupe social à part dont les autorités ne se préoccupent guerre même en cas de situation alarmante comme c’est souvent le cas des sites de RANGO, MUTAHO, RUHORORO, BUSONI, ITABA et ailleurs. Aucune autorité politique ne leur rend visite pour s’enquérir de leur situation.

 8. Droit à la Réparation.

La réparation est un élément clé de tout véritable processus de justice transitionnelle et de réconciliation. Pour mettre un terme aux actes de vengeance des victimes de l’oppression passée, il faut accueillir la soif de justice légitime des victimes. Cela implique la reconnaissance publique de leur statut de victimes, de leurs souffrances et du préjudice qu’elles ont subi ainsi qu’un effort public sérieux pour réparer, au moins symboliquement, le tort causé. C’est une façon de les reconnaître comme des êtres humains, comme des égaux, avec leur propre dignité humaine et civique.
Actuellement, les autorités ne font rien pour que les préjudices subis par les déplacés soient réparés. Même la Commission Nationale des Terres et Autres biens (CNTB) ne s’occupent que des rapatriés seulement.
Il ne serait pas exagéré que même la politique de la restitution volontaire des biens pillés qui avaient été initiée de façon volontariste entre les déplacés et ceux qui sont restés sur les collines avec l’aide des Bashingantahe a été interdite sous le prétexte fallacieux d’attendre la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle qui risque d’être hypothétique.

En conclusion, il apparait à travers tout ce qui vient d’être développé que les Instruments Internationaux et Nationaux pour promouvoir et protéger les droits de nos déplacés, mais il ya un manque criant de volonté politique. Il ne serait même pas exagérer de dire que les autorités en veulent à ces personnes.

                            Fait à BUJUMBURA, le 19/10/2012.

                            Tatien  SIBOMANA.

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